Don Maurice, avec vos frères prêtres de la Communauté Saint-Martin, vous êtes dans le diocèse de Biarritz depuis un an et demi. Quelles furent vos premières impressions ?
Tout d’abord, l’accueil chaleureux que nous avons reçu. Aussi bien des biarrots en général que de l’immense majorité des paroissiens. Et cette ambiance se continue et se renforce chaque jour : la générosité des paroissiens autour des fêtes de Noël nous a émerveillés.
Ensuite une vraie vitalité de l’Église dans la région. Après avoir servi longtemps dans le Sud-Est souvent plus anticlérical et plus austère dans les vies des paroisses, la vie paroissiale ici, la pratique dominicale, l’invitation à rejoindre les personnes âgées pour les sacrements, tout cela nous a agréablement surpris.
La place de l’Église dans la vie de la société a été également une surprise. Là encore, la vie dans d’autres diocèses de France ne m’avait pas habitué à une telle bienveillance quasi générale. Tant de la part des autorités civiles que de la population au milieu de laquelle nous vivons, nous sentons cet accueil si favorable. Les trois religieuses de la Famille Missionnaire de Notre-Dame des Neiges qui sont arrivées au mois de septembre dernier et qui sillonnent la ville à bicyclette vous diront mieux que moi cet état d’esprit quasi général.
Il y a eu quelques réticences à votre venue. Quelles étaient-elles, qu’en est-il aujourd’hui ?
Vous avez raison. En premier lieu, je crois que la volonté de notre évêque d’appeler des prêtres extérieurs au diocèse n’était pas comprise en raison d’une richesse apparente de notre Église diocésaine en nombre de prêtres. Les implantations que la Communauté Saint-Martin m’a demandé de fonder l’ont été dans des diocèses où les prêtres pouvaient avoir jusqu’à trente paroisses en responsabilité : notre arrivée était non seulement bienvenue mais désirée. Ici, ce besoin n’existe pas en apparence. Mais le souci de notre évêque vient de la pyramide des âges : dans cinq ans, sans apports extérieurs, où en serons-nous ? Un certain nombre de prêtres commencent à nous le dire.
Il y a aussi la soutane et ce qu’elle représente…
Là, je vous arrête. Tout d’abord, il faut avoir conscience qu’en dehors de l’Église, la soutane ne pose aucun problème. Au contraire, elle permet un rapport au monde bien plus rapide et quasiment toujours bienveillant : allez à l’hypermarché faire vos courses en civil ou en soutane, le temps en est multiplié par deux en raison du nombre d’inconnus vous arrêtant pour vous demander mille choses. Dans l’Église, s’il reste des réticences que l’on peut comprendre, elles sont surtout d’ordre générationnel. Jean Mercier dans La Vie en juin 2012 disait : les jeunes d’aujourd’hui mettent la soutane pour les mêmes raisons que leurs aînés l’ont enlevée.
Il y a aussi la question de la Liturgie. C’est vrai que nous lui accordons une place importante. La Communauté Saint-Martin se situe dans un courant né dans les années 80. Vivre une obéissance plus grande à ce que l’Église nous propose dans sa réforme liturgique, issue des décisions des Pères du Concile Vatican II dans la constitution apostolique Sacrosanctum Concilium, cela peut dérouter certains. Ce n’est pas seulement une question de richesse ou non des ornements, mais plutôt d’une orientation plus centrée sur le Christ et moins sur l’assemblée.
Nous recevons de l’Église les signes et les rites de la Liturgie : ils ne nous appartiennent pas ! Nous devons nous les approprier pour les assimiler et les vivre de l’intérieur. Il ne s’agit pas tant de recréer ou d’imaginer que de recevoir et d’intérioriser. Ces gestes, ces signes, ces paroles, l’ensemble des rites sont un trésor de l’Église constitué au long des siècles, corrigés et adaptés dans la pédagogie divine de l’Église. C’est elle seule qui en est maîtresse et dispensatrice. C’est seulement dans ces conditions que la Liturgie sera par elle-même apostolique et missionnaire.
Quels sont vos projets ? Quelles grandes lignes discernez-vous ?
Avec le conseil pastoral, nous allons prier et réfléchir ensemble pour ce discernement. Bien évidemment, il n’y a pas de solution miracle. Pour ce qui est de la vie paroissiale ad intra, nous allons essayer de renforcer et développer l’esprit familial communautaire à l’échelon de la paroisse Notre-Dame du Rocher. Par exemple en proposant sur les premiers mois de l’année scolaire une sorte de festival des saints, en invitant à fêter ensemble les saints patrons des clochers.
Ad extra, comment rendre plus visibles les propositions pour les enfants, les jeunes, tous les adultes qui attendent une réponse de l’Église pour leur vie ? Avec les religieuses de la Famille Missionnaire de Notre-Dame des Neiges, nous aurons aussi une proposition plus élargie de l’Annonce de l’Évangile. Comment faire entrer dans les cœurs que le bonheur naît de l’amitié avec le Christ ?
Interview originellement parue sur le site du diocèse de Bayonne