Après le Brexit, il apparaît clairement que l’Europe ne sait plus qui elle est ni où elle va. Elle n’a plus la foi. Je ne parle pas seulement de la foi qui déplace les montagnes, la foi qui fut la sienne à ses plus belles heures lorsqu’elle professait la résurrection comme horizon de toute vie et la sainteté comme oméga à atteindre. Cette foi là fit la gloire d’un continent à l’histoire longue et riche, elle inspira les artistes, les philosophes, les théologiens, les musiciens, les mystiques, les humanistes et les scientifiques.
Mais je parle aussi de l’amour-propre, de la confiance en soi, de la “foi en soi-même“, l’image positive que chaque être doit avoir de lui-même s’il veut honorer la vie qui lui a été donnée et œuvrer aux plans que Dieu a conçus pour lui. Car il en est des nations comme des individus : la connaissance et l’acceptation de soi permet d’entre-apercevoir le dessein de Dieu pour notre vie. En prenant conscience de ses manquements, on peut œuvrer, avec l’aide de Dieu, à les surmonter, à les guérir – en prenant conscience de nos forces, on peut les actualiser pleinement dans ce monde et les transformer en énergies divinement positives.
L’Europe a-t-elle perdu ses repères ?
Or, l’Europe n’a plus foi en elle-même. Elle ne sait plus qui elle est, elle ne sait pas quels sont ses faiblesses et quelles sont ses qualités. Soumis au mauvais vent des doctrines, elle est ballottée d’une opinion à une autre, d’une décision à une autre, d’une politique à une autre, d’un intérêt à l’autre sans jamais incarner le rôle qui est le sien.
À titre d’exemple, au-delà de tout ce qu’on peut leur reprocher (de manière justifiée ou fantasmée), au-delà de leur maladresse patente, au-delà du capitalisme extrême qu’ils revendiquent, au-delà de leur interventionnisme, les États-Unis ont un Manifest Destiny qui guide toute leur politique étrangère depuis deux cents ans. Certitude selon laquelle Dieu est liberté et que, en tant que nation élue, leur mission divine est d’apporter la démocratie et la liberté au monde entier aussi bien par la pensée que par l’art, par l’épée et la mise au rebut des tyrans.
Quelle “vocation divine” pour le peuple européen ?
À titre d’exemple, au-delà de tous les préjugés (justifiés ou non), au-delà d’une tendance endémique à la dictature, au-delà d’un aspect mélancolique atavique, la Russie retrouve cette notion de Sainte Russie qui fait palpiter son âme. Certitude selon laquelle ils incarnent une manifestation particulière de la Vérité et se doivent de la rayonner pour le monde…
Deux exemples parmi d’autres, car cette notion de “vocation divine” vécue par les peuples comme par les individus est une notion traditionnelle chrétienne que l’on retrouve dans la conscience de nombreux peuples dans le temps et l’espace. Le point commun de cette conscience vécue par ces nations est qu’elles sont habitées. Habitées par une vision, habitées par un souffle (oserait-on mettre une majuscule), habitées par un élan tant horizontal que vertical.
Mais l’Europe d’aujourd’hui ? Rien. Nada. Niks. Nothing. Pas de souffle d’aucune sorte, pas de vocation, pas de conscience, seule la sordidité impersonnelle et occulte des opérations bancaires, rien que la mesquinerie amorale d’hommes politiques fades aux mains de la Grande Corporation. Le brouhaha informe et stérile, l’écartèlement qui mène à l’implosion majeure qui renverra l’idée même d’Europe dans les limbes.
L’Europe des tristes sires
Le seul sursaut pathétique dont se rend capable le sentiment européen, c’est le rejet lamentable de ceux qui ont faim, de ceux que la guerre a chassé, de ceux que la mort poursuit. Ces réfugiés que les hommes politiques accueillent du bout des lèvres et les mains dans les poches. Devant qui les groupes racistes souhaitent fermer les portes alors qu’ils se font tailler en pièces par les légions sataniques de l’État islamique.
Et puis les tristes sires, ceux qui croyant faire de la repentance pour les erreurs passées font croître l’ivraie de la haine de soi. Au lieu d’assumer pleinement son histoire, afin d’en tirer les leçons et de croître en sagesse, au lieu de s’appuyer sereinement sur les fortes et puissantes racines de notre passé, l’on se focalise sur les aspects sombres et les errements de quelques ancêtres ce qui ne fait qu’augmenter notre désorientation.
Car pour apprendre de ses erreurs et en guérir (le vrai sens de la repentance), il faut s’appuyer sur ce qui est profondément enraciné en soi. Pour chasser le mal, il faut s’affirmer par une attitude et des certitudes fortes.
Rêver d’une Europe qui…
Je rêve d’une Europe unie qui affirme et assume la richesse qu’elle apporta au monde.
Je rêve d’une Europe unie qui parle d’une voix claire et puissante, qui suscite respect parmi les Nations car sa voix serait pleine de cette force tranquille et de cette sagesse qui imposent le respect.
Je rêve d’une Europe unie qui soit… quelque chose… entre l’Aigle et l’Ours.
Je rêve d’une Europe unie qui ait une doctrine de puissance à tous les niveaux, un vrai cinéma épique, une vraie armée, une vraie économie, une vraie culture.
Je rêve d’une Europe unie qui exalte les valeurs d’accueil, qui affirme sans concession l’égalité de l’homme et de la femme et la spiritualité qui lui est propre.
Je rêve d’une Europe unie qui incarne une politique forte et marque l’Histoire.
Je rêve d’une Europe unie qui n’ait pas peur de faire germer, chez ses jeunes, les plantes vivaces du courage, de la bravoure, de l’héroïsme, de l’altruisme et de l’humanisme.
Je rêve d’une Europe unie qui saura susciter loyalisme et patriotisme car ce qu’elle défend transcende le monde…