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Le testament de Marie-Antoinette, quand une reine s’abandonne à Dieu

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Fred de Noyelle / Godong

Marie-Antoinette soutenue par la Religion, Chapelle expiatoire, à Paris.

Marzena Devoud - publié le 16/11/20

Bouleversant pour la justesse et la délicatesse de chaque mot, le testament spirituel de Marie-Antoinette, rédigé quelques heures avant d’être guillotinée, suscite toujours un débat passionné quant à son authenticité. Pour l’historien Emmanuel de Waresquiel aucun doute qu’il a été écrit par la dernière reine de France.

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La lettre testamentaire de Marie-Antoinette, écrite dans la nuit du 16 octobre 1793, quelques heures avant sa mort bouleverse par la foi en Dieu absolue et l’amour envers ses enfants que la reine exprime avec une délicatesse saisissante. Egarée dans les tourments de cette époque troublée, cette lettre n’est retrouvée qu’en 1816, lorsque Louis XVIII fait saisir les documents conservés par le conventionnel Courtois, chargé de l’inventaire des papiers de Robespierre. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle certains affirment qu’il s’agit d’un faux document. « Même si ce document ne nous est pas parvenu simplement, je suis convaincu de son authenticité, explique à Aleteia l’historien Emmanuel de Waresquiel, spécialiste de la Révolution française qui vient de publier un livre passionnant qui raconte les Sept jours,17-23 juin 1789. La France entre en révolution qui ont bouleversé le cours de l’histoire.


Emmanuel de Waresquiel

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Marie-Antoinette rédige sa lettre testamentaire du fond des cachots de la Conciergerie après l’annonce de sa condamnation. Elle ne la signe pas et ne mentionne aucun nom, probablement dans l’espoir de la faire parvenir discrètement à sa belle-sœur, Madame Élisabeth qui partage la captivité des enfants royaux à la prison du Temple. Celle qui vient alors de vivre seule une captivité de deux mois et demi, sans pouvoir voir ses enfants, tente de lui transmettre ses dernières pensées, mais aussi, et surtout, de lui confier Marie Thérèse Charlotte et Louis Charles.

Contrairement à son image de femme superficielle, gâtée et autoritaire, la reine s’y exprime de façon très humble et avec une sensibilité bouleversante. Elle est essentiellement préoccupée par l’état d’esprit dans lequel ses enfants assumeront la mort de leurs parents, alors que le dauphin mourra en captivité. Sans un mot de plainte ni de regret, Marie-Antoinette ne songe plus qu’à laisser un héritage spirituel à ses enfants et se confie entièrement à Dieu. Hélas, Madame Élisabeth, guillotinée à son tour le 10 mai 1794, ne recevra jamais cette lettre.

Il n’y a pas d’autre explication que sa profonde dimension chrétienne pour comprendre la sérénité qui se dégage de ces pages. Son attitude face à la mort tient à des raisons terrestres et célestes, liées autant à son statut d’archiduchesse et de reine, qu’à sa foi.

« Ce qui m’émeut profondément à la lecture de ce testament, c’est la délicatesse des sentiments de Marie-Antoinette pour ses enfants. Elle les aime profondément. Malgré la déchirure de la séparation qu’elle sait définitive, elle leur écrit pour leur dire l’importance du pardon. Il n’y a pas selon moi d’autre explication que sa profonde dimension chrétienne pour comprendre la sérénité qui se dégage de ces pages », souligne Emmanuel de Waresquiel. Pour lui, son attitude face à la mort tient à des raisons terrestres et célestes, liées autant à son statut d’archiduchesse et de reine, qu’à sa foi. Cette attitude qu’elle aura au pied de l’échafaud, elle s’explique par son abandon à Dieu, et en même temps par sa volonté, son orgueil de souveraine de ne pas perdre la face vis-à-vis de ses ennemis. « En lisant son testament, je suis impressionné par la maîtrise de soi qui se dégage d’elle, et par son courage qui est exemplaire, ainsi que cette persuasion qu’elle a d’être dans les mains du Seigneur », confie encore l’auteur des Sept jours.

Découvrez les extraits les plus poignants du testament spirituel de Marie-Antoinette dont le manuscrit se trouve dans l’armoire de fer des des Archives nationales françaises  :

« Ce 16 octobre, 4 heures 1/2 du matin. C’est à vous, ma Sœur, que j’écris pour la dernière fois ; je viens d’être condamnée non pas à une mort honteuse, elle ne l’est que pour les criminels, mais à aller rejoindre votre frère. Comme lui innocente, j’espère montrer la même fermeté que lui dans ces derniers moments. Je suis calme comme on l’est quand la conscience ne reproche rien ; j’ai un profond regret d’abandonner mes pauvres enfants ; vous savez que je n’existais que pour eux, et vous, ma bonne et tendre sœur, vous qui avez par votre amitié tout sacrifié pour être avec nous, dans quelle position je vous laisse ! J’ai appris par le plaidoyer même du procès que ma fille était séparée de vous. Hélas ! la pauvre enfant, je n’ose pas lui écrire, elle ne recevrait pas ma lettre, je ne sais même pas si celle-ci vous parviendra, recevez pour eux deux ici ma bénédiction. J’espère qu’un jour, lorsqu’ils seront plus grands, ils pourront se réunir avec vous, et jouir en entier de vos tendres soins. Qu’ils pensent tous deux à ce que je n’ai cessé de leur inspirer : que les principes et l’exécution exacte de leurs devoirs sont la première base de la vie ; que leur amitié et leur confiance mutuelle en feront le bonheur ; (…) qu’ils sentent enfin tous deux que, dans quelque position où ils pourront se trouver, ils ne seront vraiment heureux que par leur union, qu’ils prennent exemple de nous : combien dans nos malheurs, notre amitié nous a donné de consolations, et dans le bonheur on jouit doublement quand on peut le partager avec un ami ; et où en trouver de plus tendre, de plus cher que dans sa propre famille ? Que mon fils n’oublie jamais les derniers mots de son père que je lui répète expressément : qu’il ne cherche jamais à venger notre mort. (…) Il me reste à vous confier encore mes dernières pensées. J’aurais voulu les écrire dès le commencement du procès ; mais outre qu’on ne me laissait pas écrire, la marche en a été si rapide que je n’en aurais réellement pas eu le temps. Je meurs dans la religion catholique, apostolique et romaine, dans celle où j’ai été élevée, et que j’ai toujours professée, n’ayant aucune consolation spirituelle à attendre, ne sachant pas s’il existe encore ici des prêtres de cette religion, et même le lieu où je suis les exposerait trop s’ils y entraient une fois. Je demande sincèrement pardon à Dieu de toutes les fautes que j’ai pu commettre depuis que j’existe. J’espère que, dans sa bonté, il voudra bien recevoir mes derniers vœux, ainsi que ceux que je fais depuis longtemps pour qu’il veuille bien recevoir mon âme dans sa miséricorde et sa bonté. (…) Je pardonne à tous mes ennemis le mal qu’ils m’ont fait. Je dis ici adieu à mes tantes et (ce dernier mot est rayé) et à tous mes frères et sœurs. J’avais des amis, l’idée d’en être séparée pour jamais et leurs peines sont un de mes plus grands regrets que j’emporte en mourant, qu’ils sachent au moins que, jusqu’à mon dernier moment, j’ai pensé à eux. Adieu, ma bonne et tendre sœur ; puisse cette lettre vous arriver ! Pensez toujours à moi, je vous embrasse de tout mon cœur, ainsi que ces pauvres et chers enfants : mon Dieu ! qu’il est déchirant de les quitter pour toujours ! Adieu, adieu ! Je ne vais plus m’occuper que de mes devoirs spirituels.(…) »

Il est environ 6 heures du matin lorsque Marie-Antoinette cesse d’écrire, puis pendant une heure, elle reste encore seule. On ne sait rien de ce qu’elle fait. Prie-t‑elle avant de mettre une robe blanche et marcher quelques heures plus tard vers sa mort ?

Sept jours, 17-23 juin 1789. La France entre en révolution, Emmanuel de Waresquiel, septembre 2020 


MADAME ELISABETH

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Tags:
Histoire
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