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La perception que les hommes ont de la nature de l’ange a évolué au cours de l’histoire. Jusqu’au XIIe siècle, l’ange est associé à une certaine matérialité. On retrouve notamment cette idée chez saint Bernard de Clairvaux (1090-1153), important réformateur de la vie monastique, qui dans ses Sermons sur le Cantique V,2 cite la Lettre aux Hébreux : « Les anges ne sont-ils pas tous des esprits chargés d’une fonction, envoyés pour le service de ceux qui doivent avoir en héritage le salut ? » (He 1,14).
L’ange a-t-il un corps ?
Pour saint Bernard, l’ange doit posséder un corps pour accomplir son ministère de messager. Ainsi, la matière distingue Dieu et les anges puisque Dieu est pur esprit et non composé de matière. Mais un siècle plus tard, saint Thomas d’Aquin (1225-1274), appelé le docteur angélique pour sa théologie des anges, montre dans La Somme Théologique I, 50 que la perfection de l’univers implique l’existence d’êtres purement intellectuels, donc incorporels puisque l’acte d’intelligence ne découle pas de la matière. Cette nouvelle vision bouleverse la frontière entre Dieu et les anges.
La source des différences
En quoi Dieu et les anges sont-ils donc différents ? Comment « préserver » la transcendance de Dieu par rapport à l’ange ? Saint Thomas d’Aquin opère alors une distinction qui ne se situe pas au niveau de la matière mais au niveau de l’acte d’être. En effet, l’existence de l’ange découle d’une participation directe de Dieu et ne peut exister sans lui. Or Dieu est le seul acte pur de l’univers, c’est-à-dire qu’Il est lui-même sa propre identité, ce que n’est pas l’ange. La différence de nature entre Dieu et les anges apparaît ici et elle est à la source des autres différences, comme par exemple le rapport au lieu : Dieu est partout présent et l’ange est limité, il agit en un seul endroit à la fois.
Ainsi, l’ange est un pur esprit mais il n’est pas Dieu, c’est une créature désirée et créée par amour gratuit comme l’ensemble de la Création.
