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Le dernier moine de Tibhirine, resté pour témoigner

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Pierre Durieux

frère Jean-Pierre Schumacher;

Pierre Durieux - publié le 23/11/21

Frère Jean-Pierre Schumacher, dernier moine de Tibhirine, a été inhumé ce mardi 23 novembre à Midelt (Maroc). Pierre Durieux, qui l’a rencontré, rend un bel hommage à celui qui, à la différence de ses frères martyrs, est resté "25 années "de plus" dans le monde des hommes" pour témoigner.

“Pourquoi le Seigneur nous a gardés en vie, et non point les autres ?” Cette question aura rongé le dernier des frères de Tibhirine pendant des années. Il me l’avait confiée quelques minutes après notre rencontre, en 2016, à Middelt au Maroc, 20 ans après l’enlèvement et la mort de ses frères.

“Pourquoi n’est-Il pas venu nous chercher cette nuit-là ?” : je retrouve cette question inquiète sous sa plume dans le très bon livre que Nicolas Ballet Sedaghat a cosigné avec lui en 2012 : L’esprit de Tibhirine (p.44) aux éditions du Seuil.

C’est pour témoigner que tu es resté.

La paix lui était venue par une lettre d’une Mère Abbesse suisse qui écrivit au frère Jean Pierre : “Il y a des frères qui sont appelés à témoigner par le don de leur vie et d’autres à qui il est demandé de témoigner par leur vie”.

Cette réponse lui avait donné une seconde vocation : “C’est pour témoigner que tu es resté”. De 1996 à 2021… 25 ans ! 25 ans à rencontrer des pèlerins, à témoigner, à écrire, car il répondait à la très copieuse correspondance que lui valut le film “Des hommes et des dieux”…

Rester pour témoigner. C’est ce qui arrive à l’épouse du capitaine Beltrame. C’est ce qui est arrivé au père de famille sauvé par Maximilien Kolbe. C’est ce qui est arrivé aux apôtres en 33 et qui arrive encore aux disciples du Christ aujourd’hui. Vocation chrétienne par définition : ceux qui sont restés sont au service de Celui qui est parti.

C’est au fond une question vieille, ou disons neuve, comme l’Évangile : “Et deux hommes seront aux champs, l’un sera pris, l’autre laissé” (Mt 24, 41). Le frère Jean Pierre est un exemple pour les rescapés de toute sorte, les miraculés de la dernière heure et les survivants malgré eux. Un “Simon des sirènes” de la mémoire : choisi pour que les souvenirs ne s’effacent pas.

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“L’icône écrite à la mémoire des 7 frères de Tibhirine avait fait place, de son vivant, au frère Jean Pierre, dans le cœur, en bas !”

Le film de Xavier Beauvois a rendu un hommage magnifique à la fidélité de ces hommes “mort pour l’Algérie et pour Dieu”. Eux aussi ont été taraudés par le doute : alors que les moines réfléchissent à leur éventuel départ d’Algérie devant les menaces grandissantes, frère Luc s’exclame : “Partir, c’est mourir. Je reste”.

En fait, ils sont restés et ils sont morts. En fait, le frère Jean-Pierre est resté, et il a vécu pour témoigner.

Nous ne sommes pas égaux face au martyr. Mais nous le sommes pour le témoignage. Alors que ses obsèques sont célébrées ce matin à 9h30 à Midelt au Maroc, voici en 25 lignes le sens de ses 25 années “de plus” dans le monde des hommes, au jour de sa rencontre avec son Dieu.

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hommageMoines de Tibhirine
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