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Le bon et le mauvais chasseur de cléricalisme

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Godong

Messe en la collégiale Saint-Jacques (France).

Henri Quantin - publié le 24/11/21

Pour notre chroniqueur Henri Quantin, le bon chasseur de cléricalisme est un "laïc redoutable" qui exige de ses prêtres qu’ils ne soient pas moins prêtres, mais qu’ils le soient plus.

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Quand un journaliste du XIXe siècle luttait contre le cléricalisme, cela donnait ce portrait du prêtre : « C’est le chien enragé que tout passant a le droit d’abattre, de peur qu’il ne morde les hommes et n’infecte le troupeau. » Supposément plus modéré, le chef de cabinet du ministre de l’Instruction définissait ce même cléricalisme, en 1877, comme « le complot de la police et du dogme pour l’asservissement de l’esprit humain ». Nul doute que tous ceux qui prennent aujourd’hui le cléricalisme pour cible ne soient dotés de meilleures intentions, mais la prudence peut inviter à s’entendre sur ce qu’on vise, avant de saisir son arme.

Moins prêtre ou plus prêtre ?

Si on veut que la différence entre le bon et le mauvais chasseur de cléricalisme soit plus nette que celle qui distingue le bon et le mauvais chasseur de galinette cendrée des Inconnus, on peut proposer un critère simple : le mauvais chasseur exige que le clerc soit moins prêtre, le bon chasseur exige qu’il le soit plus. Le mauvais chasseur s’en prend au sacerdoce qu’il juge trop élevé, le bon chasseur s’en prend au clerc qu’il juge trop en-dessous de sa mission. En ce sens, la meilleure manière de lutter contre le cléricalisme pourrait être d’exiger de son curé qu’il soit saint, et non de s’habituer tranquillement à l’idée qu’il est condamné à être un homme comme les autres.  

Exiger la sainteté de son curé n’a rien à voir avec l’aveuglement devant son aura supposée. Cela implique au contraire de savoir que le prêtre n’est pas saint par principe.

Telle fut du moins la ligne que Mauriac, souvent féroce avec les clercs, suivit toute sa vie. Aux prêtres ouvriers qu’il admirait, comme aux prêtres rebelles post-conciliaires qu’il goûtait moins, il rappela qu’ils ne pouvaient pas agir comme de saints laïcs : les fidèles ne leur demandaient pas d’abord la charité, mais la foi. Aussi Mauriac n’oublia-t-il jamais de leur redire que leur mission spécifique était sacramentelle, puisée dans les deux paroles de l’Évangile auxquels ils avaient donné leur vie : « Prenez et mangez en tous » et « Va, tes péchés te sont pardonnés ».

Appelé à la sainteté

Dans les articles les plus réjouissants de son Bloc-notes, Mauriacdemande à des prêtres qui confondent réforme et mépris du sacerdoce de ne pas renoncer à l’appel né du don de leur vie au Christ. À un aumônier étudiant qui tremble d’aise depuis qu’il croit mener la vie des gens normaux et qui ricane devant « les gens pieux », les « évadés de la terre » et les « célestes avant l’heure », il répond joliment : « Et moi je vous dis, mon Père, que s’il se trouvait un laïc évadé de la terre, “céleste avant l’heure”, pour recevoir la prêtrise, son confessionnal serait pressé de la même foule, même aujourd’hui, en dépit de Marx et de Freud, que celui du curé d’Ars ou de Padre Pio. » Au nom de ce qu’on peut appeler un surcléricalisme, il voit dans chaque clerc le saint prêtre qu’il est appelé à être. Aucun aveuglement sur l’homme qu’il a devant lui, mais aucune réduction de l’horizon de sainteté ouvert par la grandeur du sacerdoce : « Notre malheur à tous, c’est de n’être pas des saints, mais l’accablant pour vous autres prêtres, c’est que la sainteté soit votre devoir d’état. Elle l’est pourtant, comme vous en avez témoigné vous-même durant votre jeunesse ; et que les gens pieux l’attendent, l’exigent de vous, cela suffit sans doute à vous les rendre redoutables. »

Des laïcs redoutables

Les fidèles dont les prêtres ont le plus besoin sont des laïcs redoutables. Exiger la sainteté de son curé n’a rien à voir avec l’aveuglement devant son aura supposée. Cela implique au contraire de savoir que le prêtre n’est pas saint par principe. Laïcs redoutables : on pourrait dire aussi bien des laïcs charitables, si on n’oublie pas que la plus grande charité consiste à aider l’autre à être à la hauteur de sa vocation, et non à le rassurer dans sa médiocrité et encore moins à couvrir ses abus.

Des laïcs qui ne se lassent pas de demander à leur curé d’être un saint et des prêtres qui prennent comme une bénédiction d’avoir des fidèles redoutables : telle pourrait bien être la recette la plus juste pour une Église sans cléricalisme, ni laïcocratie.

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