La France vient de voter une loi pour demander « pardon » aux harkis de les avoir abandonnés, mais que vaut un pardon tardif et sélectif ? Même si la démarche constitue un progrès, le rédacteur en chef de “Radio Notre-Dame” constate que la question des harkis demeure l’otage de la politique.
Quand ils sont chef d’État, les villes d’eau deviennent les tombeaux des grands militaires : Pétain sombra à Vichy, de Gaulle à Évian. Et depuis lors, nous sommes assommés avec ces histoires blessées dont les plaies suppurent encore. Leur point commun : l’honneur. On ne se remet pas d’une faute morale. Un peuple peut souffrir de la faim, du froid, de la maladie, de l’occupation ; il peut survivre à la disparition de son territoire (comme la Pologne), aux déportations et même à l’extermination. Mais il ne se relève pas d’un mauvais choix fait volontairement par ses dirigeants. Quel homme politique en a conscience ?
Tous les rituels de réparation et autres repentances soulignent l’infamie de la faute morale. C’est comme un secret familial inavouable, source de silences, de haine, même de suicide. Il demeure dans nos mémoires qu’après la bataille de Pavie (1525), François Ier écrivit à Louise de Savoie, sa mère : « Madame, pour vous avertir comment se porte le ressort de mon infortune, de toutes choses ne m’est demeuré que l’honneur et la vie qui est sauve. » Son image de monarque séducteur, promoteur des arts et de la langue, estompe le caractère fondamental de cette phrase puissante et magnifique, devenue proverbiale : « Tout est perdu, fors l’honneur. » Ce qui bien sûr veut dire que rien n’est perdu. Si l’honneur est sauf, le corps peut bien rougir ; c’est comme si les meurtrissures de la peau protégeaient la chair du cœur — qui, alors, s’emplit du sang de la fierté, de la pensée droite.