Nous avons entendu dimanche 2 octobre cette demande des apôtres qui jaillissait, telle une prière, comme un cri du cœur : “Augmente en nous la foi !”Régulièrement, notre prière à Dieu se fait supplication. Elle devrait être beaucoup d’autres choses — adoration, action de grâce, remerciements, louange, bénédiction — mais reconnaissons que, souvent, nous demandons,nous réclamons, nous sollicitons le Ciel. Et, pour assurer le coup, nous mettons dans la boucle des saints dont nous espérons que l’intercession nous sera profitable. Dans une paroisse où j’ai servi, un sacristain futé avait installé une statue de sainte Rita… avec un beau paquet de cierges et de lumignons à faire brûler juste à côté. C’est devenu une des chapelles les mieux illuminées de cette grande église !
La reconnaissance de Naaman
Donc, souvent, nous demandons avec confiance un coup de pouce du Ciel pour des situations très diverses, un petit surcroît de grâce… voire un miracle pour les plus motivés : chaîne de prières, neuvaine, célébration de messes, récitation du chapelet, adoration du Saint-Sacrement, arrêt dans une église avec achat d’un cierge qui, en se consumant, continue à présenter à Dieu notre demande. Rien n’est trop beau, trop grand, quand nous désirons quelque chose et le demandons avec cœur !
Et il arrive que, parfois, nous sommes exaucés : quand les événements vont dans le sens que nous espérions, que nous appelions de nos vœux, nous décrétons que notre prière a été entendue, que Dieu s’est laissé fléchir, qu’Il a tendu l’oreille vers nous ! Stupéfaction joyeuse, allégresse, action de grâce ! C’est bien dans ce sens que vont les textes de ce dimanche avec une focalisation bien précise : la reconnaissance et la gratitude. Celle de Naaman, le général syrien, se traduit d’une double façon : en premier lieu, il proclame devant les hommes de son escorte, qui sont des soldats syriens, c’est-à-dire étrangers au peuple hébreu, sa foi dans le Dieu d’Israël.
Avons-nous témoigné autour de nous de Ses bienfaits ? Avons-nous pris la décision de L’aimer davantage et de Le faire aimer ? Ne soyons pas des ingrats !
Le polythéiste affirme de façon publique l’unicité de Dieu (2R 5, 15). Ensuite il sollicite l’autorisation de s’en retourner chez lui avec de la terre d’Israël. Là où Dieu manifeste Sa toute-puissance, la terre est comme marquée de Sa présence : Naaman s’inscrit dans la lignée du patriarche Jacob qui, après le songe de l’échelle dressée vers le ciel, s’exclame : “Dieu est en ce lieu ! Et moi, je ne le savais pas !” (Gn 28, 16.) Il fait sienne l’expérience de Moïse au buisson ardent : “Le lieu où tu te tiens est une terre sainte !” (Ex 3, 5.) D’où sa demande de pouvoir emporter avec lui de cette terre traversée par le Jourdain où il a retrouvé, par la grâce de Dieu, la santé.
Jésus nous invite à la gratitude
Dans l’Évangile, la situation est quelque peu différente : ce sont dix hommes d’un coup qui se voient guéris de la lèpre ! Étonnamment, le miracle n’a pas lieu au moment de la rencontre avec le Seigneur mais après coup. Sans doute que Jésus a voulu éprouver leur foi car quand ils Le quittent, ils sont encore marqués par les stigmates de la maladie. Ils n’ont que cet ordre d’aller se présenter aux prêtres, seuls habilités à constater une potentielle guérison. Nous l’avons entendu, c’est seulement en chemin qu’ils se rendent compte que le miracle a eu lieu, que leur demande a été exaucée.
En s’affranchissant de la recommandation de Jésus et en venant Lui rendre grâce directement, ce Samaritain, sans le savoir porte une action symbolique : sous peu l’avis des prêtres juifs ne comptera plus, ne vaudra plus ! L’ancienne alliance sera obsolète car, désormais, tout trouvera son origine et sa fin en Jésus, Alpha et Oméga. Seul ce Samaritain, un étranger pourtant — comme Naaman qui ne faisait pas partie du peuple élu — va venir rendre grâce à Jésus pour Ses bienfaits et Son action éclatante. Jésus, qui a la connaissance parfaite, savait très certainement ce qui allait advenir ! Mais s’Il marque la surprise, c’est bien pour inviter Ses auditeurs — dont nous sommes — à la gratitude.
Bonne occasion pour nous, en ce dimanche, de repasser intérieurement toutes ces fois où le Seigneur nous a accordés Sa grâce, toutes les fois où Il a étendu sur nous Sa bénédiction. L’en avons-nous bien remercié ? Avons-nous témoigné autour de nous de Ses bienfaits ? Avons-nous pris la décision, à la vue de Sa bienveillance envers nous, de L’aimer davantage et de Le faire aimer ? Ne soyons pas des ingrats !
Notre prière n’est jamais vaine
Et si jamais, cela n’a pas marché, si nous n’avons pas été exaucés comme nous le demandions ? Allons-nous bouder, Lui tourner le dos, Lui faire la tête ? Je le dis d’emblée : je suis sûr et certain que notre prière n’est jamais vaine ! Dieu S’en sert toujours d’une façon ou d’une autre. Pas toujours dans le sens que nous, nous espérions, mais Il est le Patron, et Ses décisions sont toujours justes… même si nous avons parfois du mal à les comprendre.
Alors, puis-je pousser le bouchon un peu plus loin encore ? Et si nous Le remercions aussi quand notre prière ne semble pas avoir été entendue ? Oui, vous avez bien entendu ! Le remercier juste pour ce qu’Il est : un Dieu qui prend le temps d’écouter nos demandes, nos supplications — alors qu’Il mériterait avant tout et en premier lieu notre louange et notre adoration — et qui S’en sert pour sauver le monde et les hommes selon Son plan à Lui, tellement plus efficace que nos projets à la petite semaine. M’est avis que la sainteté est à ce prix-là… et c’est bien cela que nous voulons en premier, n’est-ce pas ? Que Notre-Dame du Rosaire que nous fêtons tout au long de ce mois d’octobre nous aide dans ce détachement et cette pleine adhésion à la volonté divine !