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Andrea Tornielli, le reporter qui s’est glissé dans l’Évangile

Andrea-PattaroVision

©PattaroVision

Andrea Tornielli.

Victor Nexon - publié le 24/02/23

“La Vie de Jésus” du journaliste italien et directeur éditorial du dicastère pour la Communication du Vatican Andrea Tornielli, est enfin publié en France. Introduit et commenté par le pape François, il s’agit d’un récit personnel des Évangiles, fruit d’une expérience spirituelle très forte. Interview.

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Lire la vie de Jésus à la manière d’un roman. C’est ce que propose l’écrivain italien et actuel directeur éditorial du dicastère pour la communication du Vatican Andrea Tornielli qui publie ce mois-ci en France La Vie de Jésus (Cerf). Longtemps journaliste au quotidien La Stampa, Andrea Tornielli est notamment l’auteur de deux enquêtes Inquiesta su Gesù Bambino (Enquête sur Jésus Enfant) et Inquiesta sulla Risurrezione (Enquête sur la Résurrection) qui ont participé en leur temps aux débats animés sur l’historicité des Évangiles en Italie.

Mais cette fois, l’ambition est autre. Avec La Vie de Jésus, Andrea Tornielli aborde l’Évangile non plus par le travail des « historiens » et des « spécialistes » mais par une rencontre directe avec « son Protagoniste ». Il ne s’agit pas non plus de s’attacher « aux mille raisons de croire » mais bien d' »entrer » dans l’Évangile, de restituer l’expérience de ceux qui entourèrent Jésus. Biographie en forme de chronique donc, La Vie de Jésus d’Andrea Tornielli prolonge par l’imagination les Évangiles en soulignant des détails, des costumes, des couleurs. Un parti pris de l’auteur afin de rendre plus sensible « le besoin de rencontrer Jésus vivant aujourd’hui », confie-t-il à Aleteia.

Aleteia : Pourquoi vous êtes-vous lancé dans une énième biographie de Jésus ?
Andrea Tornielli : Ce  livre a la particularité de rassembler en un seul récit le texte de l’Évangile dans sa quasi-totalité, les commentaires du Pape et une dernière partie que j’ai imaginée. Ces trois parties sont clairement séparées : les passages de l’Évangile, écrits en italiques, sont par exemple tout à fait identifiables. Il existe de nombreuses biographies sur Jésus mais je crois que cette structure constitue quelque chose de nouveau. J’ai cherché à écrire un livre aussi bien pour ceux qui connaissent l’Évangile que pour ceux qui ne le connaissent pas, ou qui ne l’ont pas lu en entier. J’ai voulu rendre compte, à la manière d’un roman, de l’entièreté de la vie de Jésus, du début jusqu’à la fin, dans une tentative de raconter ma rencontre avec Lui. Écrire ce livre a été pour moi une expérience spirituelle très forte. J’ai lu l’Évangile comme je ne l’avais jamais lu.

J’ai cherché, en particulier, à mettre en lumière l’humanité de Jésus ainsi que celle de ceux qui l’entourent, de décrire, d’imaginer la réaction de ceux qui étaient là, de ceux qui sont allés à Sa rencontre.

Votre ouvrage n’est pas la simple retranscription du contenu des Évangiles ; vous y ajoutez également des détails qui ne s’y trouvent pas, vous reconstituez l’ambiance de l’époque, ce qu’ont dû vivre les acteurs des Évangiles… Pourquoi ?
Parce que l’Évangile est très sobre. J’ai essayé de l’envisager à la façon d’un chroniqueur, d’un reporter au sein des scènes de l’Évangile, et je crois que cette contextualisation, que cette part d’imagination – qui est une chose distincte de la fantaisie – peut aider le lecteur à entrer dans l’Évangile. C’est une aide contextuelle, scénographique.

Le pape François évoque dans l’introduction de votre livre les Évangiles non comme « une histoire du passé ou un récit édifiant avec de bons enseignements moraux » mais aussi comme une rencontre. Votre but était donc de rendre Jésus familier ?
J’ai essayé, à la manière d’un reporter, d’être là, de me figurer les scènes de l’Évangile telles qu’elles se sont produites. J’ai cherché, en particulier, à mettre en lumière l’humanité de Jésus ainsi que celle de ceux qui l’entourent, de décrire, d’imaginer la réaction de ceux qui étaient là, de ceux qui sont allés à Sa rencontre. J’ai cherché à rendre l’Évangile contemporain : chaque fois que nous le lisons, il est toujours neuf, il nous donne toujours un éclairage nouveau. Il est important de penser aux implications morales de l’Évangile, à son enseignement doctrinal, mais également de rester là, de rester au milieu des scènes de l’Évangile ; voilà ce que signifie le rendre actuel.

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Fresque de Giotto (v.1267-1337): Entrée du Christ à Jérusalem – 1303 à 1309. Zachée se cache dans l’arbre.

Le regard tient une place importante dans votre livre, l’importance de « regarder » et d’être « regardé par Jésus », à travers, notamment, l’exemple de Zachée…
L’Évangile n’est pas seulement une question de mots, mais aussi, comme le dit le Pape, de regard. L’épisode de Zachée est emblématique et intéressant du point de vue de la dynamique des évènements. Zachée est la personne la plus détestée de la ville car il est collecteur d’impôts. Il n’est aucunement pris d’une crise mystique mais seulement d’une saine curiosité, celle de voir Jésus.
Il choisit une façon de l’observer sans entrer en contact avec Lui, de le regarder à distance, caché dans un arbre, de contempler la réalité sans y participer. Et alors, chose surprenante, Jésus lève le regard, le regarde en premier, l’aime en premier et lui dit cette chose incroyable, inouïe : « Descends, que je vienne chez toi. » Il le demande à celui qui, entre tous, est le plus infréquentable. Et l’Évangile continue : Zachée se lève et dit : “Voici, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus”. Zachée, alors, se convertit réellement. Comme le dit le Pape : une conversion est vraie lorsqu’elle ouvre les poches de celui qui se convertit, lorsqu’elle le pousse à partager ses richesses. Regardons la succession des événements : la conversion de Zachée se produit car il a été regardé, embrassé du regard. Il ne vient pas le premier. Il prend alors conscience de sa propre indignité, de son propre péché, de sa petitesse. C’est un exemple très libérateur pour chacun d’entre nous.

Comment a été reçu votre ouvrage, notamment par les lecteurs éloignés de l’Église ?
J’ai eu quelques messages de la part de personnes qui ne croient pas et qui ont pourtant lu mon livre. La figure de Jésus concerne tout le monde, même les non-croyants, quand ils écrivent la date du jour, quand ils fêtent Noël, quand ils dorment une heure de plus le dimanche.

Une autre figure marquante pour moi est le centurion romain de Capharnaüm qui demande à Jésus de guérir son esclave.

Quelles sont les figures bibliques qui ont particulièrement retenu votre attention, dont vous avez aimé raconter l’histoire ?
Il y en a trois en particulier. Joseph, d’abord, auquel on n’accorde trop peu d’attention parce qu’il ne parle jamais, parce qu’il demeure au second plan. Il était, pourtant, un homme extraordinaire, amoureux de sa femme, un homme juste qui, avant de connaître la vérité sur l’enfant que sa femme attend, décide de la répudier en secret et non pas publiquement, refuse de la jeter à la rue, de la laisser démunie. Cela montre la grandeur de cet homme, père sans être père, qui a gardé cet enfant, qui a fui avec lui en Égypte.
Une autre figure marquante pour moi est le centurion romain de Capharnaüm qui demande à Jésus de guérir son esclave. Tandis que tout le monde cherche à recevoir Jésus chez lui, à l’avoir pour lui-même : « Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri », dit-il alors. Lui qui était un païen, un homme bon mais un païen, refuse de voir Jésus car il ne s’en sent pas digne. Et Jésus dit : “Je vous le déclare, même en Israël, je n’ai pas trouvé une telle foi !”. Se dire que ces paroles, Domine, non sum dignus, ont été répétées des millions de fois pour parler de nous-mêmes, de notre propre indignité, me touche beaucoup. 
La Vierge enfin : pensons à sa solitude lorsqu’elle reçoit l’annonce, lorsqu’elle tombe enceinte, lorsqu’elle le monde entier est contre elle ! Essayons de comprendre ce que furent ses pensées, ses doutes, ses peurs après avoir entendu ce qui lui a été dit, et ensuite de le répéter à son mari et aux autres. Chose extraordinaire quand on pense qu’il s’agissait d’une jeune fille de quatorze, quinze ans.

Ne pas perdre contact avec le visage et les paroles de Jésus : c’est ce que souhaite le pape François et c’est pourquoi il encourage les fidèles à toujours avoir l’Évangile avec eux. En quoi votre livre peut-il y contribuer ?
Le Pape dit qu’il faut toujours avoir l’Évangile dans sa poche. Je crois que ce livre peut y aider car il peut se lire comme une invitation à s’approcher, avant tout, de la figure de Jésus. En ce sens, j’espère que mon livre facilitera ce contact quotidien avec l’Évangile.

Propos recueillis par Victor Nexon. 

Pratique :

La Vie de Jésuspar Andrea Tornielli, Éditions du Cerf, 432 pages, 21,90 euros.

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