Ce lundi 22 février, l’Allemagne a annoncé sa volonté d’améliorer la mise en œuvre de l’accueil des migrants en renforçant le contrôle aux frontières. Notre ministre des Affaires étrangères félicite ainsi le “courage du peuple allemand”. Courage dont on peut douter puisque l’Allemagne cache ainsi sa relative remise en question quant à l’ouverture massive aux demandeurs d’asile, notamment en proposant une répartition de ces derniers dans toute l’Europe en guise de solution, une nouvelle fois applaudie par le germaniste Jean-Marc Ayrault.
À l’inverse, Manuel Valls tient un tout autre discours, et ce depuis le mois de novembre dernier. Il appelait déjà l’Allemagne à fermer ses frontières le 25 novembre, soit douze jours après les attentats parisiens ; puis le 12 février, il réitère ses propos en répétant qu’ “on ne peut pas accueillir tous les migrants en provenance de Syrie, d’Irak ou d’Afrique” quelques jours avant le sommet européen où la question des migrants a été traitée, décidé à garder sa position, indépendamment du leader européen que représente l’Allemagne.
La France, médiatrice entre chrétiens et musulmans
Il n’est pas nouveau que la France s’oppose ainsi aux décisions de l’Allemagne dont les répercussions se mesurent à l’échelle de l’Europe entière. Mais le Premier ministre se distingue dans le fait qu’il essaye, certes bien timidement, de se placer dans la continuité d’une position française plus ancienne, à savoir la médiatrice, non pas (seulement) entre les pays de l’UE, mais entre l’Occident chrétien et l’Orient musulman, une position fidèle à son parti pris spirituel d’antan. Évidemment, ce n’est pas au nom de si généreux principes que Manuel Valls justifie son exhortation à mettre fin à cette fuite en avant dans l’accueil des réfugiés. Néanmoins, félicitons-nous que l’humanisme béat ait enfin vécu, pour le plus grand bénéfice tant des peuples européens que des peuples arabes, qui ont plus besoin de solutions concrètes pour pouvoir se reconstruire que de bons sentiments.
À force de si belles paroles, notre Premier ministre pourrait finir par tomber d’accord avec Bernanos qui s’écriait dans La Liberté pour quoi faire ?:
“On voudrait faire de la France aujourd’hui, sur le plan de la politique extérieure comme sur le plan de la pensée elle-même, une espèce d’intermédiaire qui touche des pourboires de tout le monde. Je dis que la France a un autre rôle à jouer que celui d’intermédiaire. (…) Je crois, je crois de toute mes forces, que mon pays n’a pas à lier sa cause, ni à asservir sa tradition et sa pensée à une civilisation qui apparaît plutôt en réalité comme une liquidation de toutes les valeurs de l’esprit. Je crois que la mission de la France est de la dénoncer la première. Je crois qu’en la dénonçant, elle reprendra de nouveau la place de maître et de guide spirituel qu’elle n’a d’ailleurs jamais perdue, car elle n’y a jamais été remplacée.”