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Après avoir vécu cinq années en cité, ils racontent leur incroyable expérience

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Louise Hazelart Photographie

Domitille Farret d'Astiès - publié le 07/02/21

Après avoir passé cinq années dans des quartiers sensibles de France avec l'association Le Rocher Oasis des Cités, Pierre et Isabelle Chazerans reviennent sur cette expériences hors norme.

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Ils racontent, s’exclament, précisent, se coupent la parole puis se la rendent pour éclairer telle ou telle anecdote. Complicité, tendresse, chamailleries et audace caractérisent bien Pierre et Isabelle Chazerans. Aujourd’hui âgés de 68, parents et grands-parents, ils ont passé cinq années dans des cités françaises, d’abord aux Mureaux (Yvelines), puis à Rillieux-la-Pape (Rhône) et enfin à Nîmes (Gard)  avec l’association Le Rocher Oasis des Cités. Cette expérience peu commune, ils ont souhaité la raconter dans un livre, Oser la rencontre, sorti le 3 février 2021. Aleteia les a rencontrés.

Aleteia : Qu’est-ce que l’expérience en cité a changé dans votre vie ?
Isabelle Chazerans : La première chose, c’est le goût de la rencontre, particulièrement avec celui qui est très différent. J’étais quelqu’un d’un peu sauvage et solitaire. C’est fascinant, ce cœur à cœur que l’on peut avoir avec quelqu’un qui est aux antipodes de soi. On arrive à se retrouver dans l’amitié. Mon regard a changé. Quand on arrive en cité, on est bourré d’a priori, on se fait des images, et pourtant on découvre une réalité très différente, profondément attachante, et un sens de l’hospitalité que nous avons perdu et qui est pour nous une leçon.
Pierre Chazerans : Tout d’abord, j’ai appris à sortir du cadre. Avant la cité, nous choisissions nos copains, nous choisissions tout et nous ne nous « emmerdions » pas avec les personnes ennuyeuses, comme dit le pape François. En cité, quand un gars arrivait, même si j’avais envie de lui taper dessus, je l’accueillais et je lui souriais. La cité nous révèle à nous-mêmes. On ne peut pas tricher et cela nous oblige à avancer et à grandir. La deuxième chose, c’est mon regard sur les musulmans. Avant, pour moi, l’islam était globalement une menace et je pensais qu’il était totalement impossible de pouvoir faire un bout de chemin ensemble. Maintenant, je suis convaincu que le dialogue interreligieux en vérité est un chemin indispensable.
Isabelle Chazerans : Cela m’a confortée dans ma foi chrétienne. J’ai rencontré des musulmans formidables, qui avaient un grand désir de s’approcher de Dieu, mais j’ai perçu que j’avais la chance d’avoir une religion qui était une religion de liberté. C’est une religion de l’esprit, et non de la lettre. Il nous est demandé d’aimer et c’est cela l’essentiel.




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Qu’est-ce que cette mission à deux a apporté à votre couple ?
Pierre Chazerans : Cela a été un deuxième départ. Nous nous sommes retrouvés comme des jeunes mariés dans un studio fait de bric et de broc, mais avec les meubles en plus ! Avant, nous avions une vie où nous étions tous les deux très occupés. Nous avons découvert beaucoup de choses ensemble et c’était la première fois de notre vie que nous faisions autant tous les deux, ce qui nous a vraiment rapprochés. C’était comme un second voyage de noces, ou presque.
Isabelle Chazerans : J’ai ressenti une très grande liberté dans le fait de partir avec deux valises. J’ai eu l’impression de vivre en accéléré toutes les saisons du mariage. Nous nous sommes découverts davantage, avec les bonnes et les mauvaises surprises, les belles choses et celles qui agacent. Le fait de cohabiter en permanence provoque des frictions. Nous avons dû nous ajuster. Nous avons eu une vie de couple bien plus dense que dans la vie ordinaire. Après cinq ans de cité, nous nous connaissons beaucoup plus profondément.
Pierre Chazerans : C’était un choc de pratiques pédagogiques qui n’étaient pas forcément les mêmes. Je viens du monde de l’entreprise, où il faut que cela avance, et Isabelle était professeur. Je savais qu’elle était une femme de caractère et je me suis rendu compte qu’elle était conciliante et qu’elle avait une grande capacité à l’empathie, à mettre de l’huile là où cela grince, ce que je ne subodorais pas.
Isabelle Chazerans : J’ai découvert le besoin d’action et d’efficacité de Pierre, mais aussi son courage quand il se disputait avec des grands jeunes, et son humilité quand il fallait encaisser des remarques parfois désagréables.

La cité nous a appris la vraie compassion : à souffrir avec, à pleurer avec, par amour de l’autre et non par sensiblerie.

Qu’est-ce que votre expérience en cité vous a enseigné ?
Isabelle Chazerans : À prendre les gens et à les accompagner là où ils en sont. J’ai pris une gifle de mes jugements intérieurs : le non-jugement, c’est très exigeant. Quand on reçoit des confidences difficiles ou que l’on partage des épreuves, on reçoit des claques. La cité est un monde terriblement fragile, où les gens traversent des épreuves douloureuses, et c’est dans le partage des souffrances les plus fortes que nous nouons les relations les plus intimes.
Pierre Chazerans : La cité nous a appris la vraie compassion : à souffrir avec, à pleurer avec, par amour de l’autre et non par sensiblerie.

Que nous disent les cités aujourd’hui ?
Pierre Chazerans : Ces  cités sont très nombreuses et nous sommes aujourd’hui face à un défi de civilisation. Elles nous disent leur mal-être en terme d’intégration. La grande majorité des gens des cités voudraient s’intégrer, ils crient leur désir de normalité.
Isabelle Chazerans : Elles nous disent : « Prenez exemple sur nous et retrouvez le sens de l’accueil de l’autre et la protection du plus faible ». Là-bas, les personnes âgées sont respectées et entourées jusqu’au bout. On ne voit pas de rejet de la personne handicapée, qui a sa place dans la famille. Il y a une acceptation de la fragilité. La cité est pleine de vie, de joie. C’est un monde vivant.

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Editions Emmanuel

Oser la rencontre, par Isabelle Chazerans, éditions Emmanuel, 3 février 2021, 18 euros.




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