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Se taire ou parler ? Le courage de la cohérence

Archbishop Georg Ganswein pays his respect to Pope Emeritus Benedict XVI

Antoine Mekary | ALETEIA

Benoist de Sinety - publié le 15/01/23

Il y a un temps pour se taire, et un temps pour parler, dit l’Ecclésiaste. Mais parler pour régler ses comptes n’est pas la même chose que parler pour rétablir la justice, explique le père Benoist de Sinety, curé de la paroisse Saint-Eubert de Lille.

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S’il est un mot qui appelle avec insistance au silence et à la retenue, c’est bien celui de secrétaire : secret et taire… « Il n’est de grand homme pour son majordome » soutiennent les Britanniques. On sait qu’en Albion, désormais, nul aîné n’est glorieux pour son petit frère. Et l’on découvre du côté de Rome qu’il est décidément bien difficile d’accepter d’être au service non de son ego mais de la mission confiée. Que les héritiers d’une couronne se déchirent n’est pas une nouveauté. Qu’ils étalent leurs motions intérieures en nous prenant à témoin de leurs états d’âme est moins courant mais bien conforme à l’air du temps. La publication en italien et sans doute bientôt en français, des mémoires de Georg Gänswein, est plus inédite. Approcher et vivre au quotidien avec un grand homme implique un devoir. Un seul, qui ne semblait pas jusque-là, pouvoir souffrir la moindre restriction : se taire.

L’obscénité de l’époque

On peut rapporter des anecdotes si l’on veut briller en société ou pour éclairer la recherche d’historiens. Mais il y a quelque chose de profondément dérangeant à rédiger des pages qui dévoilent ce qu’on n’a été admis à voir que parce que celui qui vous y a invité avait confiance en vous. Que dire de plus lorsqu’on découvre que les pages publiées ont été rédigées du vivant de l’homme que l’on dit vouloir honorer et que l’on a aimé ? Mais pourquoi s’en étonner ? Ce genre de pratique n’est-il pas en phase avec l’obscénité de l’époque où l’on sort un téléphone portable pour filmer un accident avant même d’appeler les secours ? 

En fait, ce que dit ce livre, c’est que Rome est aussi une cour, comme l’est Buckingham, où certains pleurent leurs privilèges perdus pendant que d’autres cherchent à tout prix à élargir les leurs. Est-ce fragiliser l’Église que de dénoncer cela ? La question est toujours la même : faut-il parler et dire crûment les choses, au risque de jeter l’opprobre sur l’ensemble du corps ? Mais ne sont-ce pas plutôt ceux qui se livrent au petit jeu des prébendes et des contrats d’édition qui discréditent l’Évangile proclamé non pour les bien-portants mais pour les malades, l’Évangile qui met à bas les puissants et élève les humbles ?

Ils sont l’Église

À ce titre, l’enquête publiée ce week-end par La Croix (« Sous emprise », 14-15 janvier 2023) fait réfléchir sur le chemin à parcourir pour que, dans les actes et non seulement dans les déclarations d’intentions, on trouve le courage de la cohérence. Le reporter Mickael Corre le résume admirablement en exergue de son dossier qui concerne des abus et des crimes très probablement commis dans un internat de la communauté des Béatitudes et dont l’un des principaux suspects se retrouve numéro deux de la communauté alors que, depuis des années, sa dangerosité a été signalée. Il écrit cette phrase au sujet des personnes auprès desquelles il a enquêté et que l’on désigne aujourd’hui comme « lanceurs d’alerte » : « Ces lanceurs d’alerte, pour qui la lutte contre les abus est devenue le combat d’une vie, sont la raison pour laquelle vous ne lirez pas sous ma plume que “l’Église couvre” parce qu’eux aussi sont l’Église. »

L’Espérance de l’Église réside aujourd’hui beaucoup dans ces hommes et ces femmes qui se battent pour que leurs voix soient entendues, non par vanité, mais par désir que le corps auquel ils appartiennent de plein droit, se reprenne et retrouve la vocation pour laquelle il est offert au monde. Ils sont là, debout, envers et contre tous, dans l’urgence — car il y a urgence — pour dire l’injustice qui règne dans une communauté qui n’a d’autre raison d’être que d’appeler à la Justice, pour pointer du doigt le crime diabolique qui consiste à se parer des attributs de l’Amour pour pervertir et blesser en profondeur. Ils sont l’Église, ceux qui ont été brisés par des baptisés, qui continuent parfois d’être stigmatisés ou méprisés par certains, tout en demeurant eux-mêmes absolument attachés au Christ, habités par l’Esprit. Ils font penser à Péguy qui, durant de longues années, ne pouvait communier puisqu’il n’était pas marié religieusement et qui, les poings serrés, regardant la foule des justes se presser au banc du pain céleste, murmurait pour lui-même : « Et pourtant je suis chrétien… »

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ÉgliseVatican
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