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Spiritualité
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La dernière épreuve de la petite Thérèse est-elle une « nuit de la foi » ? 

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Fr. Baptiste de l’Assomption o.c.d. - publié le 16/04/23 - mis à jour le 28/04/23

Jusqu’au seuil de la mort, Thérèse de Lisieux connut l’épreuve de la sécheresse spirituelle en portant la douleur de l’incroyance de ses frères. Ce dernier tourment nous aide à comprendre le sens ultime de la vie chrétienne : porter dans l’amour de Jésus la souffrance des hommes.

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Durant les derniers mois de sa vie, la petite Thérèse a été plongée dans une épreuve qui l’a fait « manger le pain de la douleur » (Ms C, f°6r). La considération du Ciel n’était plus pour elle un sujet de joie mais de tourments continuels. La vie éternelle, à laquelle elle aspirait, s’est transformée, dans sa pensée, en un retour vers la « nuit du néant » (Ms C, f°6v). On qualifie parfois cette dernière épreuve de « nuit de la foi ». Est-ce la meilleure manière de la décrire ? La petite Thérèse, qui connaît cette expression et l’utilise parfois (PN 54,15 ; CJ. 11.8.5), se garde bien de l’employer pour rendre compte de cette dernière épreuve. Pourquoi ? 

Qu’est-ce qu’une « nuit de la foi » ? 

L’expression « nuit de la foi » vient de l’enseignement de saint Jean de la Croix. Elle cherche à décrire l’expérience d’éblouissement, et donc d’obscurcissement, que peut ressentir celui qui fixe son regard sur la Lumière trop grande qui émane du Christ. Cette « nuit de la foi » ne trouvera son terme que dans la vision béatifique, lorsque nous verrons Dieu face à face dans le ciel. Mais, comme l’explique Jean de la Croix, elle peut évoluer, à l’instar d’une nuit cosmique. 

Quelles sont les étapes de cette « nuit de la foi » ? Une première étape, que Jean de la Croix appelle « nuit du sens », correspond au crépuscule. Elle consiste dans le passage, souvent vécu chez les chrétiens qui ont une vie de prière, de la méditation à la contemplation. L’âme avait l’habitude de s’appuyer sur ses réflexions, ses images, ses paroles, ses bonnes pensées pour prier.

Elle va désormais se laisser conduire par l’influence délicate du Saint-Esprit qui la touche au plus intime. Elle va devoir consentir, ce qui n’est pas toujours facile, à se laisser faire par Lui dans la prière. Plus elle s’agrippe à ses anciennes lumières et ses manières de faire, et plus elle souffre. Mais plus elle s’abandonne entre les bras du Père avec confiance et plus elle expérimente une paix intérieure.

Une lumière dans la nuit

Après un certain temps, souvent quelques années comme le dit Jean de la Croix, cette « nuit de la foi » peut devenir plus obscure. Elle correspond alors aux ténèbres de minuit. Dieu, à ce moment, illumine l’âme avec une telle puissance qu’il en fait ressortir toutes les racines du péché. Parce qu’elle est éblouie par Dieu, elle ne voit plus qu’une chose : sa petitesse, sa misère, sa souillure.

Elle vit un véritable purgatoire qui durera aussi longtemps que l’exigera sa purification. L’âme doit alors s’attacher, par une foi de plus en plus pure, à Dieu lui-même, à sa Parole, consignée dans les Écritures, etc. Une fois qu’elle est passée par ce « souterrain », elle est alors prête pour entrer dans une intimité et union toute nouvelle avec Jésus. Elle devient son amie, son intime. Elle connaît mieux désormais les secrets de son cœur. 

Dieu dirige chaque âme d’une manière absolument unique.

Parvenue à l’humilité véritable, elle ne présente rien d’éclatant aux yeux de ceux qui l’entourent. La nuit de la foi n’est pas alors abolie, elle est plutôt arrivée aux clartés de l’aurore. Elle commence à goûter dès cette terre les joies de la vie éternelle. Il ne faudrait certes pas rigidifier cet enseignement de Jean de la Croix. Comme il l’explique lui-même, Dieu dirige chaque âme d’une manière absolument unique. Ces explications, sans être des théorèmes, sont plutôt des balises. 

La douleur de l’incroyance

Qu’en est-il de Thérèse ? Ce qui est très étonnant, avec elle, c’est que sa dernière épreuve (1896-1897) est vécue alors même que cette croissance, dont parle saint Jean de la Croix, est parvenue à son terme. Dès sa jeunesse, alors qu’elle aimait « penser » dans sa chambre comme elle le dit (Ms A, f° 33v), la petite Thérèse a reçu d’une manière habituelle des grâces de contemplation.

Durant ses cinq premières années de vie au Carmel (1888-1893), particulièrement obscures, elle est passée par cette purification profonde qui a débouché sur une intimité toute nouvelle avec Jésus, et la découverte de sa « petite voie ». En 1895, comme elle l’explique à sa sœur Céline, elle vit d’amour avec une telle intensité que le voile qui la sépare du ciel devient pour elle presque transparent. Sa foi est désormais illuminée par une telle clarté que sa nuit laisse place à l’aurore. Et pourtant, comme elle l’explique dans le Manuscrit C, elle entre dans de nouvelles ténèbres à partir de Pâques 1896 jusqu’à sa mort en septembre 1897. Comment le comprendre ? 

Thérèse en donne l’explication : elle doit manger le pain noir de l’incroyance de ses frères les pécheurs. Elle va poser des actes de foi, en portant dans son être même, la douleur de l’incroyance de ceux pour qui elle prie. Elle va devenir leur véritable sœur et leur mère. Elle va leur donner la vie de la grâce par ses actes de foi héroïques qui remportent la victoire sur l’obscurité de leur incroyance. En cela, elle marche sur les pas de Jésus qui, le premier, a porté dans sa chair le poids du péché du monde entier et qui, par sa Résurrection, y a répandu sa Lumière et sa Vie. 

En quoi sommes-nous concernés ? 

La « petite voie » que Thérèse a suivi pour aimer Jésus et le faire aimer nous permet de mieux comprendre le but de notre vie chrétienne. La plénitude de la charité à laquelle nous sommes appelés comporte, en quelque sorte, deux sommets qui culminent en un troisième : le premier, lorsque, après avoir laissé la lumière du Christ nous purifier jusqu’à l’intime, nous unissons notre misère à sa Miséricorde infinie. Le deuxième, lorsque, transformés en Lui et conformés à son Mystère, nous devenons capables de porter avec Lui et en Lui la souffrance et le péché de nos frères afin de leur donner la vie. Le dernier, enfin, comme apostolat post mortem, depuis le Ciel, où les trésors de grâces récoltés peuvent désormais se déverser avec abondance sur la terre. 

En ce sens, Mère Teresa, l’une des meilleures disciples de la petite Thérèse, s’est particulièrement illustrée. En suivant sa « petite voie », elle s’est laissée conduire à une union très intime avec Jésus. Et parce qu’elle lui était unie, elle a pu porter avec Lui et en Lui, pendant plusieurs décennies, les ténèbres de ceux à qui elle apportait la Lumière. Depuis le Ciel, elle continue à intercéder pour les « plus pauvres des pauvres » si chers à son cœur. 

Les tentations contre la foi 

Alors, plutôt que de « nuit de la foi » pour la dernière épreuve de Thérèse, il faudrait plutôt parler, comme elle le dit, de « tentations contre la foi » (Ms C, f° 11r), qu’elle a su vaincre, par amour pour ses frères incroyants, en laissant le Christ remporter la victoire en elle. Désormais unie à Lui, dans la gloire où la « nuit de la foi » s’est transformé en vision, elle peut intercéder pour nous et nous enseigner sa « petite voie ».

Sainte Thérèse de Lisieux vue par les artistes :

Abréviations :

MsA : 1er manuscrit autobiographique
MsC : 3e manuscrit autobiographique 
Pn : Poésies
CJ : Carnet Jaune [de Pauline, Mère Agnès de Jésus]

Pratique :

La question de la participation à la Rédemption a été traitée au numéro 181 de la revue Carmel. Pour approfondir l’enseignement de la petite Thérèse et des autres saints du Carmel, vous pouvez vous abonner à la revue en cliquant ici.
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