Jamais le nombre de naissances n’avait atteint un niveau aussi bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est le grand enseignement à tirer des dernières statistiques de l’Insee. En 2022, 725.997 bébés sont nés en France, soit 16.000 de moins qu’en 2021 (-2,2 %). Une baisse qui s’inscrit dans une tendance de fond : depuis 2011, les naissances reculent chaque année – à l’exception de 2021 qui a connu un léger rebond post pandémie de Covid -, et sont désormais inférieures de 12,8 % à celles de 2010.
Et chaque nouveau mois vient confirmer la baisse de la natalité en France. En août 2023, 1.896 bébés sont nés en moyenne par jour. Une chute de 8,3 % par rapport à août 2022. Les huit premiers mois de l’année 2023 enregistrent déjà 35.000 naissances de moins qu’en 2022, soit une baisse de 7,2 %. Si la tendance se poursuit sur ce rythme-là, le nombre de naissances pourrait bien ne pas dépasser la barre symbolique des 700.000 naissances en 2023.
1,8 enfant par femme en 2022
Le nombre de naissances dépend à la fois du nombre de femmes en âge de procréer et de leur fécondité. Or le nombre de femmes en âge d’avoir des enfants est assez stable depuis 2016. La chute de la natalité ne s’explique donc pas par une diminution de la population féminine âgée de 20 à 40 ans, mais par la baisse de la fécondité. Et en effet, en 2022, l’indicateur conjoncturel de fécondité (ICF) s’établit à 1,8 enfant par femme (contre 1,84 en 2021) quand le taux de renouvellement des générations est fixé à 2,1. Il était à un peu plus de 2 en 2010, puis a diminué chaque année entre 2015 et 2020.
Pourquoi les Français ont-ils moins d’enfants qu’avant ? Est-ce par choix, ou bien leur désir d’enfant est-il contrarié ? Les facteurs sont nombreux et variés. Les experts pointent du doigt une conjoncture morose, marquée par l’inflation et la guerre en Ukraine, une confiance dans l’avenir écornée au regard des crises climatique et sanitaire, l’augmentation de l’âge moyen auquel les femmes ont leur premier enfant (31,2 ans en 2022, alors que la fertilité féminine commence à diminuer à l’âge de 30 ans), une politique familiale pas assez dynamique… Si certains freins nous laissent relativement impuissants, d’autres sont susceptibles d’être levés en vertu d’un changement de politique et de mentalité.
Quels leviers pour relancer la natalité ?
Une étude de l’Unaf menée par Kantar en 2021 souligne un triste paradoxe : alors que les Français ont effectivement de moins en moins d’enfant, le désir d’enfant reste fort et serait supérieur à 2,3 enfants par femme. En conclusion de cette enquête, Marie-Andrée Blanc, présidente de l’Unaf, en appelait à une relance de la politique familiale, afin “de redonner confiance aux parents, de leur apporter un soutien concret et stable dans la durée et de faciliter la conciliation vie familiale, vie professionnelle en y impliquant aussi le monde du travail”.
Mais il y a aussi un phénomène dont on ne peut nier l’évolution, celui du non-désir d’enfant assumé par celles que l’on appelle les “no kids” ou encore les “childree” (libres d’enfants). En 2022, un sondage Elle-Ifop montrait que parmi les femmes sondées en âge de procréer et n’ayant pas encore d’enfants, 30% déclaraient ne pas en vouloir. Sur ces femmes sondées et ayant répondu ne pas vouloir d’enfants, “50% estiment qu’un enfant n’est pas indispensable à leur développement personnel et 48% citent l’envie de rester libre”.
Que répondre à cela ? Notre chroniqueuse et essayiste Blanche Streb rappelait récemment dans Aleteia que “les enfants et les générations qui se renouvellent engendrent espoir et vitalité. Qu’il faut soutenir les couples et les jeunes parents. S’encourager aussi quand on a des enfants à ne pas seulement s’en plaindre, mais à nourrir et transmettre la joie de son foyer, à rayonner, même si donner la vie c’est aussi donner beaucoup de sa vie”. Un levier à portée de tous.