Parvenu à l’âge adulte, Jean quitte son village natal d’Aïn Karem, aux environs de Jérusalem, pour mener une vie de solitude et de prière dans le silence du désert de Judée. Et voici qu’en “l’an quinze du règne de l’empereur Tibère“, la parole de Dieu lui est adressée.“Il parcourut toute la région du Jourdain, en proclamant un baptême de conversion pour le pardon des péchés” (Luc 3, 1-3).
C’est donc sur les rives de ce fleuve long de quelque 360 km, prenant sa source sur les pentes du mont Hermon et s’écoulant vers la Mer Morte, que Jean annonce la venue imminente du Royaume de Dieu et baptise les foules accourues de toutes parts pour l’écouter. Jésus lui-même se présente (Mt 3, 13-17) ; Jean le désigne alors à ses disciples comme “l’Agneau de Dieu” venu prendre sur lui le péché du monde. Le moment est arrivé pour le précurseur de “diminuer” pour que le Messie, lui, puisse “grandir”.
Al-Maghtas, le site historique du baptême du Christ ?
C’est sur le cours inférieur du Jourdain, non loin de la ville de Jéricho que les chrétiens ont, dès le Ve siècle, fait mémoire du ministère de Jean et de cet événement en particulier. À cet endroit, le fleuve se rétrécit, ne séparant que de quelques mètres les actuelles Jordanie et Cisjordanie palestinienne – occupée par Israël.
Sur la rive jordanienne (Est), l’on trouve le site d’Al-Maghtas (“immersion” en arabe), qui pourrait être le lieu historique du baptême du Christ – la fameuse “Béthanie-au-delà-du-Jourdain” dont parle l’évangéliste Jean. Des fouilles archéologiques effectuées au début des années 2000 tendraient, en tous cas, à le confirmer. Elles y ont en effet révélé des ruines d’églises et de monastère d’époque byzantine, ainsi que des grottes d’ermites et des fonts baptismaux, détruits sans doute par des tremblements de terre et des crues. Al-Maghtas a été inscrite en 2015 au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Qasr Al-Yahoud et les aléas de l’Histoire
En face, sur la rive cisjordanienne du fleuve (Ouest), se tient le site de Qasr Al-Yahoud (“fief des Juifs” ou “traversée des Juifs”, en arabe), appelé ainsi probablement en souvenir de la traversée du fleuve par les Hébreux entrant dans la Terre promise, sous la conduite de Josué (Josué 3, 14-17). Ici aussi, l’on commémore le baptême du Christ. Des récits attestent d’un pèlerinage annuel des franciscains au moins depuis 1641.
En 1932, la Custodie de Terre Sainte acquiert un terrain à proximité puis y élève une église en l’honneur de Jean le Baptiste. Elle se voit pourtant contrainte d’abandonner le sanctuaire, après la guerre de juin 1967, dite des Six jours. L’armée israélienne, qui s’est emparée de cette zone frontalière, l’a en effet transformée en champ de mines, interdite d’accès aux pèlerins et aux visiteurs. La visite de Jean Paul II en Terre Sainte en l’an 2000 permet de récupérer une partie du terrain et d’en rouvrir un petit accès, qui sera bien vite refermé, en raison de la 2e Intifada.
Avec l’accord des autorités israéliennes et palestiniennes, une ONG britannique, Halo Trust, s’est employée à déminer le terrain durant plusieurs années. Après une sécurisation totale du périmètre de 55 hectares, l’église de saint Jean-Baptiste a été rendue aux franciscains en 2020, et pour la première fois depuis 54 ans, la fête du baptême du Christ a pu être célébrée sur les lieux mêmes de son avènement.