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Toute vie est un miracle sacré

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Elisabeth de Courrèges - publié le 19/12/22

Elisabeth de Courrèges, ergothérapeute, est actuellement en mission avec l'Œuvre d'Orient dans une unité de soins palliatifs pédiatrique à Erevan, en Arménie. Si les débats actuels sur la fin de vie semblent ignorer la dignité propre à tout être humain, la confrontation avec la réalité, et plus précisément avec ses petits patients arméniens, rappelle à la jeune femme que chaque vie est un miracle sacré.

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À peine mon réveil coupé, j’ai ouvert un œil et mon téléphone pour parcourir le fil d’actualité : « la commission sur la fin de vie est désormais créée ». Et j’appréhendais déjà un débat que des arguments idéologiques allaient inonder et saturer. 

Puis j’ai consulté les réseaux sociaux et plus particulièrement la page de l’ADMD (Association pour le droit de mourir dans la dignité): les arguments que ces partisans d’une « aide active à mourir » y avaient publiés m’apparaissaient tellement éloignés des réalités que j’avais pu rencontrer par mon métier. 

Puis j’ai lu une tribune estimant que les catholiques n’avaient pas voix au chapitre dans ces discussions à venir, leur contribution pouvant porter gravement atteinte à la laïcité… (quand ils cherchent à rappeler que chaque individu a une conscience, et que celle-ci a besoin d’être éclairée).

Puis je suis tombée sur une vidéo annonçant au même moment que la proposition de loi en faveur de l’inscription de l’IVG dans la Constitution sera débattue au Sénat en février. 

Au fur et à mesure que j’avançais dans ces visionnages et lectures, je commençais à être troublée. 

Je me suis alors demandé pourquoi est-ce que l’on en voulait tant à la vie humaine de comporter des périodes de fragilité et, pourquoi est-ce que l’on cherchait par tous les moyens à les évacuer.

Puis je me suis demandé si cela valait encore la peine de s’engager auprès des personnes en situation de vulnérabilité tant les débats annoncés laissaient déjà entendre que ces accompagnements n’avaient plus de sens. Parce que l’on parlait désormais de ces vies fragilisées comme d’un poids pour les familles, les soignants et la société. Parce que l’on considérait ces personnes comme dépouillées de toute utilité et de toute dignité.

Puis je me suis demandé si cela valait encore la peine de continuer à témoigner, alors que les messages que je cherchais à délivrer ne semblaient pas être considérés par mes contemporains dans leur grande majorité.

Puis je me suis demandé ce matin-là si cela valait vraiment la peine de se lever. 

Je me suis levée, j’ai gravi les douze marches qui me conduisent comme chaque matin vers l’unité palliative pédiatrique et ses douze protégés, et j’ai enfilé mon tablier. 

Tout en effectuant les premiers soins et rituels de la journée, j’ai ouvert grand les yeux (et cette fois les deux) et j’ai contemplé :

j’ai contemplé Christian, petit bébé trisomique rescapé d’une IVG, qui nous fait toujours pleurer de rire quand, en prenant son bain, il tente de chantonner et que sa tête, en rythme, commence à dodeliner. 

Puis j’ai contemplé Matthieu, que l’on a annoncé mourant déjà trois fois depuis le début de l’année, et qui, bien qu’extrêmement fragile et extrêmement surveillé, réagit toujours par quelques doux sourires aux massages que je viens lui prodiguer.

Ce sera ma conviction de Noël : chaque vie humaine porte en elle une infinie dignité.

Puis j’ai contemplé Tigran, l’enfant non désiré, l’enfant qui n’arrivait pas au bon moment, l’enfant d’une prostituée. Ce même enfant que dix soignantes et religieuses viendront aujourd’hui entourer, enlacer, embrasser. 

Puis j’ai contemplé Arsène, un vrai p’tit mec, diagnostiqué en état pauci-relationnel, comme Vincent Lambert il y a quelques années. Bien qu’aveugle et muet, Arsène sent quand un autre enfant est disposé à ses côtés. Il le sent et il le sait. Un sourire se dessine alors sur son visage et semble l’irradier. Nul doute qu’il cherche à entrer en relation et à communiquer. C’est comme s’il veillait sur ses petits frères et sœurs en humanité.

Puis j’ai contemplé Sophia qui n’a pas encore 6 mois mais dont le pronostic vital est déjà engagé. Et en logeant son corps tout frêle entre mon coude et mon poignet je lui ai murmuré: « Oh Sophia, si tu savais. Si tu savais comme on voudrait tous ici que tu ne manques jamais d’amour et d’amitié, même si ta vie ne devait durer qu’une année, un mois, une journée. » 

Puis j’ai contemplé le portrait de Mère Teresa et me suis souvenu des mots qu’elle avait autrefois prononcés, comme s’ils m’étaient encore adressés en cette fin de matinée: « Ce qui est important pour nous, c’est l’individu. Pour aimer une personne, il faut venir tout près d’elle. Si nous attendons que le nombre y soit, nous serons perdus dans la quantité. » 

Puis j’ai ouvert la porte de la chapelle et j’ai contemplé Jésus dans le Saint Sacrement exposé. Discrètement, au pied du grand autel, les premiers éléments d’une crèche avaient été disposés. 

Ce matin d’Avent m’est alors apparu comme un rappel: chaque vie ici est un miracle sacré. Ce sera ma conviction de Noël, de tous mes prochains réveils et de tous mes prochains levés: chaque vie humaine porte en elle une infinie dignité.

Tags:
Fin de vie
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