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Surgie des sables de Dunkerque, Notre-Dame des Dunes veille toujours

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Google street view

Chapelle Notre-Dame des Dunes de Dunkerque.

Anne Bernet - publié le 03/07/23

Après Notre-Dame de Rocamadour, Aleteia entame son tour de France des sanctuaires marins avec Notre-Dame des Dunes. Découverte dans les sables des plages de Dunkerque, la Vierge la plus septentrionale de France, protectrice des pêcheurs et des corsaires, a traversé les siècles sans cesser de veiller sur les Dunkerquois.

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Un jour de 1403, des ouvriers travaillent sur les dunes qui entourent Dunkerque du côté de la mer. Les temps sont difficiles en ce début du XVe siècle et l’interminable conflit qui oppose Français et Anglais a de lourds retentissements sur la cité portuaire. Aussi les Dunkerquois, par précaution, ont-ils décidé d’agrandir leur ceinture de remparts. Or, alors qu’ils creusent, voici que de l’eau se met à couler, abondante et claire. Ils la goûtent et s’étonnent : loin d’être saumâtre, comme ce serait normal si près de la mer, cette source inattendue est fraîche et pure.

Debout sur les dunes

La découverte de cette eau potable, trésor inestimable en cas de siège, n’est pas la seule surprise que leur réserve le chantier. Un peu plus loin, en limite de plage, les pioches vont ramener à la surface une statue en bois de Notre-Dame. Le travail en est assez fruste, la polychromie abîmée par le sel et les embruns ; il s’agit vraisemblablement de la figure de proue d’un ancien navire que son patron avait placé sous la protection de l’Étoile des mers. La nef a-t-elle sombré depuis des lustres, entraînant avec elle son équipage ? Au contraire, a-t-elle, protégée par Notre-Dame, pu regagner le port, perdant seulement dans la tempête sa figure de proue ? Nul ne le saura jamais. Ce qui compte, c’est que le Ciel ait ramené l’image mariale vers le rivage où elle s’est retrouvée enfouie sous le sable. La nouvelle de la découverte s’est déjà répandue dans la cité ; le clergé, les autorités, la population accourent pour voir la merveille et, d’un commun accord, ils vont déposer la statue dans l’église du couvent des Capucins.

Le lendemain, elle en a disparu… On la cherche, et on la retrouve debout sur les dunes, là où elle a été mise au jour. Marie ayant ainsi manifesté sa volonté, les Dunkerquois décident de lui élever à cet endroit un oratoire. Comme celui touche à la source jaillie de nulle part, la chapelle est baptisée Notre-Dame de la Fontaine, puis, quelques décennies après, Notre-Dame des Dunes. Les Dunkerquois, et d’abord les marins, qu’ils arment à la guerre, à la course, à la pêche ou au commerce, prennent l’habitude, avant d’appareiller, de venir s’y recueillir et confier à la Vierge surgie de la mer le soin de veiller sur eux.

Notre-Dame a ses parts de prise

En 1654, alors que les Hollandais sont en guerre avec la France, un corsaire dunkerquois est pris et retenu prisonnier à Amsterdam. Désespérant de recouvrer jamais sa liberté, il promet à Notre-Dame des Dunes, s’il rentre au pays, d’embellir autant qu’il sera en son pouvoir son sanctuaire. Aussitôt, dit l’histoire, les chaînes qui l’entravent tombent d’elles-mêmes, la porte du cachot s’ouvre et l’homme s’évade sans difficulté. Rentré chez lui, il tient promesse et dépense en effet largement ses anciennes parts de prise pour reconstruire superbement la chapelle. En 1697, malheureusement, Louis XIV charge Vauban de fortifier Dunkerque comme jamais, ce qui est fait, mais entraîne, pour des raisons stratégiques, d’intégrer Notre-Dame des Dunes dans le dispositif de défense ; la chapelle se retrouve prise dans une demi-lune, enserrée dans la forteresse ; son accès devient, du même coup, quasi impossible aux civils.

Même la Révolution ne va pas entraver la dévotion des équipages à Notre-Dame des Dunes, tant et si bien que les autorités républicaines renoncent à fermer le sanctuaire et le dépouiller de ses richesses.

Pas pour longtemps. Avec la fin de la guerre de Succession d’Espagne et la signature du traité d’Utrecht, en 1713, l’une des clauses imposées aux Français est le démantèlement immédiat des fortifications dunkerquoises. Les murailles de Vauban sont abattues, quinze ans à peine après leur construction et l’accès à Notre-Dame des Dunes libéré. Comme s’ils voulaient rattraper le temps perdu, les Dunkerquois s’y pressent en foule et prennent l’habitude de faire hommage à leur patronne d’une partie de leur pêche, quand elle a été bonne, ou lui reversent, comme à une associée d’armement de leurs navires, sa part du butin fait sur les Anglais et les Bataves. Cet argent permet d’agrandir et embellir encore la chapelle.

Un magasin de poudre

Même la Révolution ne va pas entraver la dévotion des équipages à Notre-Dame des Dunes, tant et si bien que les autorités républicaines, redoutant des réactions de violence de la part des inscrits maritimes et de leurs familles, renoncent, en 1791, à fermer le sanctuaire et le dépouiller de ses richesses. Alors que toutes les paroisses de la ville sont fermées au culte et pillées, la chapelle du bord de mer reste ouverte, protégée, et l’on y chante même un Te Deum lorsque, en 1793, après un vœu public à Notre-Dame des Dunes, les Anglais lèvent le blocus du port et n’écrasent pas la ville sous les bombes.

Commence, hélas, dans le courant de l’hiver 1793-94, la grande campagne de « décatholicisation » voulue par la Convention. Cette fois, personne n’est épargné. Tous les cultes religieux sont interdits en France, toutes les églises fermées, avant, souvent, d’être démolies, et le clergé poursuivi, y compris les prêtres constitutionnels qui, rompant avec Rome, ont prêté le serment schismatique de la constitution civile du clergé. L’attachement des Dunkerquois protège encore un peu Notre-Dame des Dunes. L’on feint de ne pas remarquer que la statue de la Vierge, au-dessus du maître autel, a disparu, mise à l’abri par des fidèles qui, d’ailleurs, ce faisant, risquent leur tête et, au lieu d’envoyer les démolisseurs, les autorités décident de transformer la chapelle en magasin de poudres, ce qui est, certes, une profanation mais lui épargne, en lui trouvant une fonction patriotique, d’être rasée. Notre-Dame des Dunes, ainsi protégée, traverserait la Terreur et les années de persécution si, en 1795, la poudrière qu’elle abrite ne sautait, accidentellement, n’en laissant rien… En toute logique, il devrait en être d’elle comme de tant d’églises françaises laissées à l’abandon, que personne ne se soucie alors de racheter et rebâtir, laissant se perdre le culte et les traditions du lieu. Ce serait d’autant plus plausible que la fontaine a fini, elle aussi, par disparaître, à force de travaux de terrassements qui ont eu raison de la source.

La prière des enfants

Mais voilà que, vers 1812, le voisinage s’aperçoit que des enfants ont fait des ruines de la chapelle leur lieu de rendez-vous. Cela ne serait guère surprenant s’ils en faisaient un terrain de jeu ; ce n’est pas le cas. Quand ils s’y réunissent, autour d’un autel improvisé qu’ils ont bricolé avec de la terre glaise et qu’ils ornent de fleurs et de bougies, c’est afin d’y prier ensemble la Vierge disparue… Quelle aïeule inconsolable, quel vieux marin toujours fidèle à sa Patronne leur a raconté l’histoire de Notre-Dame des Dunes ? On ne sait mais, spontanément, les petits se sont remis à lui vouer un culte. Les adultes, saisis de stupeur et de honte, prennent la mesure de leur ingratitude, ils ont l’impression que, par l’intermédiaire de ces gamins, le Ciel leur donne une leçon et leur indique ce qu’ils ont à faire : reconstruire Notre-Dame des Dunes.

Une souscription est ouverte, les dons affluent et, en 1816, un nouveau sanctuaire, surnommé « la Petite Chapelle », s’élève à l’emplacement du précédent. La statue de Notre-Dame est y solennellement ramenée. Les Dunkerquois n’ont pas lésiné pour que l’endroit soit beau. Harmonieux mélange de style flamand et italien, baroque à l’intérieur, offrant au pèlerin sa coupole ornée de la Vierge à l’Enfant en majesté, son plafond bleu nuit étoilé et sa rose des vents qui indique la direction des principaux sanctuaires mariaux de France et d’Europe, ses murs en seront, en quelques années, tapissés d’ex-voto remerciant du secours apporté aux fidèles, et ses voûtes présenteront une remarquable collection de maquettes de navires dont les équipages en péril auront réclamé l’aide de Notre-Dame des Dunes. 

Depuis plus de six siècles

En 1888, après une campagne à Terre Neuve spécialement dure, qui aura vu la perte de nombreux canots morutiers dunkerquois, partis à la dérive à travers les bancs et disparus corps et biens dans le brouillard, les survivants, et les familles des perdus en mer se cotiseront afin d’offrir la tragique statue de la Pietà, qui porte, avec son Fils mort, toute la douleur et tous les deuils du monde. Pendant la guerre de 1870, puis en 1914, Dunkerque, menacée par l’ennemi, se placera sous la protection de sa Patronne céleste, et s’en portera bien. Ainsi la Petite Chapelle reste-t-elle depuis plus de six siècles, un haut lieu de la dévotion maritime.

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Tags:
sanctuaireVierge Marie
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