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L’œuvre de Dieu est une œuvre cachée

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femme priant dans une église

© Roman Zaiets - Shutterstock

Pierre Vivarès - publié le 28/01/22

Chaque vendredi, l’abbé Pierre Vivarès, curé de la paroisse Saint-Paul à Paris dans le Marais, commente l’actualité avec son regard de pasteur. Il décrypte cette semaine l’illusion de croire que le Salut du monde passe par la conquête politique. L’œuvre de la grâce passe par la conviction des cœurs.

De nombreux ouvrages sont publiés en ce moment concernant la foi chrétienne, l’avenir du christianisme ou les « méthodes » possibles pour palier l’effondrement de la foi, des vocations ou de la pratique religieuse dans nos sociétés occidentales. Je citerai Chantal Delsol avec La Fin de la chrétienté(Cerf), Georges Weigel avec L’Ironie du catholicisme moderne (DDB). Dans la même veine nous avons Rod Dreher, Le Pari bénédictin et Résister au mensonge (Artège) ou encore La communion qui vient de Paul Coirat et alii (Seuil). 

Un décryptage de notre temps

Ces livres et tant d’autres sont instructifs et peuvent nourrir une réflexion personnelle ou communautaire. Ils permettent de décrypter le temps où nous sommes dans son évolution lente, mettre en garde contre les tentations et les fausses pistes qui pourraient nous séduire mais qui ne correspondraient pas à la foi telle que le Christ nous l’a enseignée. Ils éclairent le mouvement de l’histoire sur de longues périodes qui dépassent souvent nos vies d’hommes. Face à ces constats, ces mises en garde, ces suggestions, on peut se sentir petit bouchon de liège sur le grand fleuve de l’Histoire, ballotté par des lames de fond philosophiques et sociétales qui nous dépassent et nous emportent, pris dans une sorte d’impuissance à changer le cours du temps, impuissant à mettre en garde nos contemporains sur certains mirages de la modernité, incapables à réformer ce qui doit l’être, hic et nunc. Tous ces livres montrent un effondrement réel de nos cultures occidentales fondées sur la parole du Christ et la foi chrétienne, le maillage ecclésial et les demandes sacramentelles. La situation est même pire encore pour peu que l’on se penche dans le détail des faits et lorsque l’on a connaissance de certains chiffres qui sont tus, comme le nombre de personnes qui se convertissent quotidiennement à l’islam dans notre pays, chiffres qui ne sont pas communiqués par les responsables musulmans eux-mêmes afin de ne pas alimenter les discours d’extrême droite.

Les constats historiques, sociologiques et philosophiques doivent être lus, étudiés et compris pour ne pas être dans l’illusion, le déni ou le mensonge. Cependant il y a une réalité, bien plus forte que tous les courants de l’histoire, qui est la grâce de Dieu. Ces livres bien souvent ne décrivent pas que Dieu agit, aujourd’hui et maintenant, dans le cœur de nombreuses personnes. Bien sûr leurs auteurs le savent, le vivent et le contemplent en chrétiens. Mais cette œuvre de Dieu n’est pas quantifiable, palpable sociologiquement, elle n’est pas lisible immédiatement. Façonnés que nous sommes par une lecture de l’histoire qui n’est que politique, nous ne voulons voir les réalités que dans des rapports de force numériques, des zones d’influence ou des victoires légales à coup de lois et de décrets. 

Car notre sujet n’est pas l’État, aussi noble et nécessaire soit-il, c’est l’homme et Dieu, l’homme et spécialement le pauvre, et Dieu, un Dieu qui s’est fait pauvre. 

La résurrection du Christ une nuit d’avril en Judée au premier siècle de notre ère est un non-événement dans l’histoire politique du monde. La prédication de Paul dans la synagogue d’Antioche de Pisidie (Ac, 13) n’est qu’un phénomène sectaire et confidentiel dans la vie religieuse de l’Empire romain. La liste des non-événements pourrait être allongée à l’envie ; l’on ne retient pourtant que l’édit de Milan en 313, l’édit de Thessalonique en 380 ou le baptême de Clovis en 496. Or l’œuvre de Dieu — et la Bible nous le montre à chaque page — est une œuvre cachée, souterraine, puissante et calme. Ce levain dans la pâte est plus puissant que tous les événements qui apparemment font date : lors de la mort d’Étienne en martyr à Jérusalem, Rome offrait de grandioses funérailles publiques à… un corbeau ! Qui se souvient du corbeau ? 

Notre sujet n’est pas l’État

Aussi la dimension théologale doit être préférée et je note chez les jeunes chrétiens, les recommençant, les catéchumènes, un désir de Dieu et une verticalité bien différente des combats politiques ou sociaux de nos aînés. Non que ceux-ci n’aient ancré leur foi et leur action dans la prière (ce serait injure de dire cela) mais ils pensaient que le chrétien devait avoir une action politique et croyaient encore que des actions politiques pouvaient changer le cours inexorable d’un changement des paradigmes sociaux. Mais on ne se bat pas pour des convictions, on les partage, et s’il faut de la violence pour imposer une vérité, bien faible est alors cette prétendue vérité.  

Entre les circonvolutions de certains évêques qui font la danse du ventre avant les élections présidentielles pour montrer à quel point ils sont « républicains-compatibles » et les manifestations contre le mariage homosexuel ou pour la défense de l’embryon qui ne sont juste plus audibles par nos contemporains car ils ne partagent plus les prémisses philosophiques chrétiens, j’ai bien peur que nous ne soyons toujours hors-sujet. Car notre sujet n’est pas l’État, aussi noble et nécessaire soit-il, c’est l’homme et Dieu, l’homme et spécialement le pauvre, et Dieu, un Dieu qui s’est fait pauvre. 

La conviction des cœurs

Nous voulons toujours être heureux et croyons que notre bonheur passera par la victoire de nos idées. Regardons plutôt Dieu qui agit quotidiennement dans les cœurs et contemplons la puissance de l’Évangile qui est à l’œuvre. Notre joie ne peut venir que de là et non de victoires qui ne seraient que des violences. Si d’autres que nous sont dans ce logiciel de conquête, cela les regarde, mais ils seront emportés par la faiblesse même de leur mode opératoire, comme fut emportée une Église dont la force ne venait que d’une domination sociétale et non plus d’une conviction des cœurs. « Ne vous réjouissez pas parce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous parce que vos noms se trouvent inscrits dans les cieux. » À l’heure même, Jésus exulta de joie sous l’action de l’Esprit saint, et il dit : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. Oui, Père, tu l’as voulu ainsi dans ta bienveillance. Tout m’a été remis par mon Père. Personne ne connaît qui est le Fils, sinon le Père ; et personne ne connaît qui est le Père, sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler » (Lc 10, 20-22).

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